L'expédition Franklin

Publié le

L’expédition Franklin est une expédition maritime et polaire britannique qui avait pour but de réussir la première traversée du passage du Nord-Ouest et l'exploration de l'Arctique. Le passage du Nord-Ouest est le passage maritime nord, qui relie l'océan Atlantique à l'océan Pacifique en passant entre les îles arctiques du grand Nord Canadien.

Commandée par le capitaine John Franklin, l'expédition part de Greenhithe en Angleterre, dans la matinée du 19 mai 1845, avec un équipage de 110 hommes et 24 officiers. Les navires, HMS Erebus et HMS Terror, s'arrêtent brièvement dans le port de Stromness aux Orcades dans le nord de l'Écosse, et de là, ils naviguent vers le Groenland avec le HMS Rattler et le tender Barretto Junior. Dans la baie de Disko, sur la côte ouest du Groenland, 10 bœufs du navire de transport sont abattus pour fournir de la viande fraîche, le matériel est transféré sur l’Erebus et le Terror, et les membres de l'équipage écrivent traditionnellement les dernières lettres pour leur famille. Avant le départ définitif de l'expédition, cinq hommes sont libérés de leurs obligations et renvoyés chez eux sur le Rattler et le Barretto Junior, réduisant l'équipage à 129 hommes répartis sur les deux navires. L'expédition est vue pour la dernière fois par des Européens, au début d'août 1845, lorsque les capitaines Dannett et Robert Martin des baleiniers Prince of Wales et Enterprise rencontrent l’Erebus et le Terror en mer de Baffin, qui attendaient de bonnes conditions pour traverser le détroit de Lancaster.

Après deux années sans nouvelle de Franklin, l'opinion publique s'inquiète, et Lady Franklin ainsi que les membres du Parlement et de la presse écrite britannique exhortent l'Amirauté à envoyer une équipe de recherche. En réponse, l'Amirauté élabore un plan en trois volets mis en œuvre au printemps 1848, dépêchant une équipe de recherche dirigée par le naturaliste John Richardson et l'explorateur John Rae, par la terre, descendant le fleuve Mackenzie jusqu'à son embouchure sur la côte sur l'océan Arctique. Deux expéditions par voie maritime sont également lancées, l'une entrant dans l'archipel arctique canadien par le détroit de Lancaster, et l'autre entrant par le côté Pacifique. En outre, l'Amirauté offre une récompense de £20 000 à toute personne, équipe ou pays pouvant prêter assistance aux équipages des navires commandés par John Franklin. Après ces trois tentatives qui échouent, les Britanniques concentrent leurs efforts sur l'Arctique au point que « trouver Franklin soit devenu rien de moins qu'une croisade ». Des ballades comme Lady Franklin's Lament, célébrant Lady Franklin à la recherche de son mari perdu, deviennent populaires.

Beaucoup de personnes se joignent aux recherches. En 1850, onze navires britanniques et deux navires américains balayent l'Arctique canadien. Plusieurs convergent au large de la côte est de l'île Beechey, où les premiers vestiges de la tragédie sont découverts, dont les tombes des trois marins John Torrington, mort le 1er janvier 1846 à 20 ans, John Hartnell, mort le 4 janvier 1846 à 25 ans et William Braine, mort le 3 avril 1846 à 32 ans. Aucun message de l'expédition Franklin n'est trouvé sur le site.

En 1852, quatre navires sous le commandement d'Edward Belcher, dont le HMS Resolute, partent à la recherche de l'expédition de John Franklin. Le Resolute et l'un de ses sister-ship furent pris dans les glaces dans le détroit du Vicomte Melville et abandonnés là en 1853. Deux ans plus tard, le navire, vide, fut découvert par le baleinier américain George Henry, commandé par le capitaine James Buddington of Groton, du Connecticut qui le ramène aux États-Unis, qui le répareront et le rendront au Royaume Uni. Plus tard son bois servira à tailler le Resolute desk, un bureau que la reine Victoria offrira en 1880 au président américain Rutherford Hayes et que l'on retrouve aujourd'hui dans le bureau ovale.

En 1854, en explorant la péninsule Boothia pour le compte de la Compagnie de la Baie d'Hudson, John Rae découvre une nouvelle preuve du destin des hommes de Franklin. Rae rencontre un Inuit près de Pelly Bay le 21 avril 1854, qui lui raconte qu'un groupe de 35 à 40 hommes blancs sont morts de faim près de l'embouchure de la rivière Back. D'autres Inuits confirment cette histoire et évoquent notamment des cas de cannibalisme parmi les marins en train de mourir. Les Inuits montrent à Rae de nombreux objets qui sont identifiés comme ayant appartenu à Franklin et ses hommes. En particulier, Rae rachète à ces Inuits plusieurs fourchettes et cuillères en argent qui seront plus tard identifiés comme appartenant à Fitzjames, Crozier, Franklin, et Robert Osmer Sargent, un second à bord de l’Erebus. Le rapport de Rae est envoyé à l'Amirauté en octobre 1854, laquelle demande instamment à la Compagnie de la Baie d'Hudson d'envoyer une expédition vers la rivière Back à la recherche d'autres signes de Franklin et ses hommes.

Le chef de comptoir James Anderson et l'employé James Stewart, tous deux de la Compagnie de la Baie d'Hudson, voyagent en canot au nord de l'embouchure de la rivière Back. En juillet 1855, un groupe d'Inuits leur dit qu'un groupe de « qallunaat » (le terme inuit pour désigner un groupe non inuit) était mort de faim le long de la côte. Au mois d'août, Anderson et Stewart trouvent un morceau de bois avec inscrit « Erebus » et un autre avec « Mr. Stanley », le chirurgien à bord de l’Erebus, sur l'île de Montréal dans la baie de Chantrey où la rivière Back atteint la mer.

Malgré les conclusions de Rae et Anderson, l'Amirauté ne prévoit pas d'autres recherches de sa propre initiative. La Grande-Bretagne déclare officiellement que l'équipage est mort en service le 31 mars 1854. Lady Franklin, à défaut de convaincre le gouvernement de financer une autre recherche, commandite personnellement une autre expédition sous le commandement de Francis Leopold McClintock. Le navire d'expédition, la goélette à vapeur Fox, est acheté par souscription publique et part d'Aberdeen le 2 juillet 1857. En avril 1859, des équipes à traîneau quittent le Fox à la recherche d'indices sur l'île du Roi-Guillaume. Le 5 mai, l'équipe dirigée par le lieutenant de la Royal Navy William Hobson trouve un document laissé par Crozier et Fitzjames dans un cairn précédemment édifié par James Clark Ross en 1831. Il contient deux messages. Le premier, daté du 28 mai 1847, explique que l’Erebus et le Terror ont hiverné dans les glaces au large de la côte nord-ouest de l'île du Roi-Guillaume, et avaient plus tôt hiverné au large de l'île Beechey après avoir navigué autour de l'île Cornwallis. « Tout va bien » (All well) précise le message. Le deuxième message, écrit en marge de cette même feuille de papier, est beaucoup plus grave. Signé en date du 25 avril 1848, il indique que l’Erebus et le Terror ont été pris au piège dans la glace depuis le 12 septembre 1846 et que l'équipage a abandonné le navire, le 22 avril. Vingt-quatre officiers et membres d'équipage sont morts, y compris Franklin, le 11 juin 1847, à peine deux semaines après la date de la première note. Crozier reprend le commandement de l'expédition, et les 105 survivants prévoient pour le lendemain, de mettre cap au sud vers la rivière Back. L'expédition de McClintock trouve aussi un squelette humain sur la côte sud de l'île du Roi-Guillaume. Toujours habillé, il est fouillé, et certains documents ont été trouvés, y compris un brevet de Premier maître au nom de « Henry Peglar (né en 1808), Capitaine du mât de misaine, HMS Terror ». Toutefois, étant donné que le vêtement est celui d'un maître commis du navire, il est plus probable que le corps est celui de Thomas Armitage, un maître commis de la Grand-Chambre sur le HMS Terror et équipier de Peglar, dont il portait les papiers. Sur un autre site à l'extrême ouest de l'île, Hobson découvre un canot de sauvetage contenant deux squelettes et des reliques de l'expédition Franklin. Dans le bateau se trouve une grande quantité de matériel abandonné, y compris des bottes, des mouchoirs en soie, du savon parfumé, des éponges, des pantoufles, des peignes, et de nombreux livres, dont un exemplaire du Vicaire de Wakefield d'Oliver Goldsmith. McClintock prend également les témoignages des Inuits sur le sort de l'expédition.

Charles Francis Hall organise deux expéditions entre 1860 et 1869, vivant dans la baie de Frobisher sur l'île de Baffin parmi les Inuits, puis près de la baie de Repulse, sur la partie continentale du Canada. Il trouve les camps, les tombes, et les vestiges sur la côte sud de l'île du Roi-Guillaume, mais aucune trace de survivants de l'expédition Franklin qu'il croit trouver parmi les Inuits. Bien qu'il ait conclu que tous les membres de l'équipage sont morts, il estime que le compte-rendu officiel de l'expédition peut encore être trouvé sous un cairn de pierre. Avec l'aide de ses guides Ebierbing et Tookoolito, Hall enregistre des centaines de pages de témoignages des Inuits. Parmi ces rapports se trouvent des témoignages de visites aux navires de Franklin, et une rencontre avec une équipe d'hommes de race blanche sur la côte sud de l'île du Roi-Guillaume, près de la baie de Washington.

L'espoir de trouver des documents perdus conduit le lieutenant Frederick Schwatka de l'armée américaine à organiser une expédition sur l'île entre 1878 et 1880. Voyageant depuis la baie d'Hudson, sur la goélette Eothen, Schwatka, rassemble une équipe qui comprend les Inuits qui avaient aidé Hall, continue vers le nord à pied et à traîneaux à chiens, en interrogeant les Inuits, visitant les sites connus ou probables où les membres de l'expédition Franklin avaient été, et hivernant sur l'île du Roi-Guillaume. Bien que Schwatka ne trouve pas les papiers qu'il espère, dans un discours lors d'un dîner donné en son honneur par l’American Geographical Society en 1880, il note que l'expédition avait fait « le plus long voyage en traîneau jamais fait aussi bien en ce qui concerne le temps que la distance », avec onze mois et quatre jours pour 4 360 kilomètres. Il s'agit de la première expédition occidentale dans l'Arctique qui s'appuie entièrement sur le même régime alimentaire que les Inuits, et il établit que la perte des documents de Franklin est au-delà de tout doute raisonnable. L'expédition de Schwatka ne trouve pas de restes de l'expédition Franklin plus au sud d'un lieu connu sous le nom de Starvation Cove sur la péninsule Adelaide, ce qui est bien plus au nord que le but déclaré de Crozier, la rivière Back, et à plusieurs centaines de kilomètres du comptoir le plus proche, sur le Grand Lac des Esclaves.

Les Aventures du capitaine Hatteras
En 1855, Jules Verne publie une nouvelle intitulée « Un hivernage dans les glaces » dans le Musée des familles. Elle comporte certains éléments qui figureront plus tard dans le roman. Une première version de « Voyages et aventures du capitaine Hatteras » paraît en 1864 sous forme de deux romans séparés « Les Anglais au pôle Nord » et « Le Désert de glace ». Jules Verne remanie ensuite le récit ; les illustrations de Riou sont rajoutées et le roman est réédité en décembre 1866. La version définitive paraît sous forme de feuilleton dans le bimensuel Le Magasin d’Éducation et de Récréation à partir de mars 1864, dans le premier numéro de ce magazine.

Ce roman est en partie basé sur l'hypothèse d'une mer polaire libre de glace. Historiquement, le géographe August Petermann fut le principal tenant de cette théorie, qui influença certaines expéditions de 1853 à 1876.

Publié dans Inspirations

Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :